Prédication de Noël 2016: « Dieu vient dans un monde de violence nous apporter l’espérance »

Lectures bibliques

  • ·      Matthieu 2, 1-12
  • ·      Matthieu 2, 13-18

Texte : « Dieu vient dans un monde de violence nous apporter l’espérance »

Cette année encore, on fêtera Noël. Comme d’habitude. La petite musique de Noël s’est réveillée, la magie s’est enclenchée 



(sur la musique) Ca y est, on a sorti le sapin, les boules, le père noël qui n’a pas les boules lui, et y a même des chants qui tournent dans la tête.

Noël, c’est aussi la petite minute émotion que les publicités savent si bien nous dire en cette période de folle consommation. 



De la neige, un renne, mais surtout, acheter, acheter acheter, cadeaux, cadeaux cadeaux, tout cela avec la « on ne peut plus louable » justification de l’amour. What else ? 

Et puis les cadeaux nous rendent fous de joie, merci à la société de consommation de nous offrir tant de choses, même si elles ne sont pas toujours utiles.  



Ces choses, parfois, nous replongent en enfance. Je crois que cela se passe commentaire.


Ca, c’est le Noël des pubs, de la télé. C’est le Noël mielleux, qui sent bon les biscuits, la cannelle et l’orange, qui s’émerveille devant les cadeaux, tous plus beaux les uns que les autres. Je dois bien avouer que moi aussi, j’aime ce Noël, car c’est celui de mon enfance. Un Noël forcément un peu Bisounours.

Mais ce Noël-là remplit-il vraiment tout ? Si nous préparons la fête dans nos maisons, avec leurs lumières, des événements dans le monde parlent fort dans l’actualité.

D’abord ce drame humanitaire en Syrie, en particulier à Alep détruite par les bombes. Des milliers de vies ont été fauchées par la guerre. Quant à la population civile qui reste, elle vit une détresse indescriptible, quasiment coupée des approvisionnements. Des milliers de personnes se retrouvent sans foyer dans leur propre pays. Evidemment, les premières victimes de cette catastrophe humanitaire sont une fois de plus les femmes, les enfants et les personnes âgées ou malades, qui seront encore davantage exposés avec l’arrivée de l’hiver et de la neige.

Ensuite il y a bien sûr ce terrible attentat, encore, qui a eu lieu lundi. Mais cette fois ce sont d’autres symboles qui sont touchés : Berlin, ville allemande meurtrie et reconstruite, ville de réconciliation, avec l’église de la réconciliation à l’arrière-plan de la photo.  Cette fois, c’est un marché de Noël qui a été visé, et comme un symbole sur cette photo, le sapin et son étoile sont à terre, renversés qu’ils ont été par le camion fou.

Et il y en tant d’autres… Faut-il fêter Noël en oubliant un peu tout cela, en se bouchant les oreilles ? Dans ce monde de violence, ne sommes-nous pas impuissants ?

Eh bien je vais vous étonner. Ce sentiment que l’actualité nous échappe signifie que Noël, cette année, se déroulera effectivement comme d’habitude. Comme dès l’origine, lors du premier Noël. Nous l’avons entendu dans l’évangile de Matthieu qui est comme la face obscure de la nativité. Loin des gloria des anges et des bergers joyeux qui accourent, loin de l’histoire suave et touchante de la crèche, cette face de l’histoire résonne avec fracas dans un monde de violence. Pas moins que le téléjournal de Darius. Il y a cette colère d’Hérode qui, furieux d’avoir été berné par les mages, fait massacrer les bébés de moins de deux ans à Bethléem. Une liquidation comme il y en a eu et il y en aura tant d’autres. Jésus, né pauvrement, rejeté de toutes les auberges, est un enfant miraculé. Jésus, Yeshoua, veut dire « Dieu sauve ». Celui qui sera le salut pour tous les hommes a été bien fragile au début : il aurait pu être un détail de l’histoire. Il nait dans un monde de violence et de souffrance qui n’est pas sans annoncer son calvaire et sa mort sur la croix. C’est remarquable comme la Bible prend en compte nos réalités humaines. On est loin des bisounours.

Dans la Bible aussi, donc, entre la naissance merveilleuse et la terreur déclenchée par le roi Hérode surgit une tension. Comme aujourd’hui, entre la joie de Noël et la noirceur de l’actualité surgit aussi une tension. C’est cette tension qui a été représentée sur cette  image que j’ai choisi de mettre sur le feuillet, quitte à peut-être en choquer certains. Car le sens de Noël, c’est bien Dieu qui s’incarne dans bébé qui naît dans un monde de violence. De guerre. De mort. De rejet. De destruction. Un monde, en bref, de ténèbres, inexpliquées et inexplicables. On ne peut que se lamenter comme Rachel qui pleure ses enfants et ne peut être consolée.

De ces ténèbres jaillit pourtant une lumière. Oh bien sûr, elle est fragile cette lumière, comme une bougie dans la nuit. Une lueur. Presque un détail. Mais non : qu’est-ce qu’elle est importante cette lumière. Au fond, elle change tout. Car à la suite du nouveau-né de Bethlehem, c’est une brèche qui a été ouverte, une brèche d'où germe l'espérance, pour que la vie soit vie de plénitude pour tout un chacun, malgré la noirceur de ce qui nous entoure.

Même si trop de bourrasques de violence soufflent toutes les bougies allumées pour fêter Noël, même si trop de familles, de mamans avec leurs bébés doivent quitter les abris même précaires d'une crèche et fuir comme Marie et Joseph la cruauté des Hérodes d'aujourd'hui,  même si trop d'images d'injustice brouillent nos esprits,
le message de Noël, que Dieu est venu partager notre condition humaine pour être avec nous quoiqu'il advienne, reste plus que jamais d'actualité.

Alors à vous, chers amis, chers frères et sœurs en Christ, voici la bonne nouvelle de Noël: au milieu des ténèbres a jailli l’espérance, et cette lumière, même fragile est tout à fait concrète. Nous avons besoin les uns des autres, besoin de Dieu, pour nous soutenir, nous guider. Pour vivre notre humanité, nous avons besoin de donner, comme le montre cette publicité. 

 

Faisons un don pour ceux que la vie n’épargne pas. Donner, par exemple pour les habitants d’Alep, via l’EPER. Donner pour ceux qui sont seuls. Donner de soi. Allumer une bougie, faire un geste d’espérance. Ca peut paraître un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup. Car Noël est cette fête où le détail prend toute la place, parce que Dieu s’y révèle. Une fête où l’on découvre que des événements peuvent tonitruer dans l’actualité, mais l’essentiel se jouera ailleurs, dans une main qui se tend, une parole qui s’offre, un geste qui apaise. Le détail qui fait vivre.
Amen.

(Merci à Daniel Marguerat pour l’inspiration donnée par sa prédication dans le n° 74 de Lire et Dire)

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