Pour trouver Charlie et sortir de la crise, vivre la réconciliation et le témoignage
Textes bibliques
- Ephésiens 2,11-22
- Actes 2, 42-47
- Luc 10,1-4 et 8-9
Prédication
Avant tout, je crois que nous traversons une crise des
valeurs dans une société en perte de repères, crise où le fondamentalisme
rassure, qu’ils soit islamiste ou chrétien fondamentaliste, face à la mollesse
des autres. Crise où certains vont même jusqu’à se plaindre de la présence de
trop de femmes pasteurs dans l’Eglise réformée vaudoise. Non mais sérieusement,
comment prendre au sérieux une telle affirmation alors que nous voyons la
richesse infinie que les femmes apportent au ministère et à l’Eglise (merci au Conseil Synodal pour sa prise de position remettant l?Eglise au milieu du village ou plutôt la femme au milieu de l'Eglise) ?
Mais crise des valeurs, il y a bel et bien, et cette crise touche aussi
l’Eglise, qui décline toujours plus, sans parler du mouvement pour l’unité des
chrétiens qui, en ce début de XXIe siècle, semble traverser un hiver œcuménique
sibérien qui n’a pas de fin. Vraiment, nous sommes en crise, et dès lors ce
matin nous pouvons nous poser ensemble la question : où est Charlie ?
Face à la crise, deux options se présentent à nous : soit
subir le changement, soit le prendre comme une chance. Le mot crise, en grec,
signifie «choix ».
La crise, c’est peut-être le moment opportun pour faire un choix et résister,
pour revivifier l’Eglise et son message de paix d’unité.
Car vous l’aurez compris, si j’ai été invité ce matin à
prêcher ici chez vous à Grandvaux, c’est d’abord pour parler d’œcuménisme, et
de l’Eglise. Mais que cela ne nous empêche pas de penser à l’actualité.
L'Oecuménisme du XXIe siècle
Oui aujourd’hui, la crise touche plus que jamais nos
Eglises. Nous ne sommes désormais plus dans l’Eglise de Grand-Papa, vous savez
celle qui était au milieu du village, les cures ne sont plus forcément habitées
par des pasteurs comme ici à Grandvaux, les paroissiens se font plus rares au
culte, sans parler de la pénurie de vocations pastorales (avis aux amateurs ici
présents)… Nous avons tourné la
page du XXe siècle florissant, tant au niveau ecclésial qu’œcuménique, avec la
construction de tous ces centres œcuméniques scomme pas très loin d’ici celui
de Vassins à la Tour-de-Peilz pour entrer dans un XXIe siècle plein de défis
pour notre Eglise.

sommes passés
Aujourd’hui, c’est donc la crise, et face à celle-ci nous
est présentée une page blanche de l’histoire de l’Eglise, celle du XXIe siècle:
si vous deviez réinventer l’Eglise, qu’est-ce que vous y écririez sur cette
page blanche ?
Comment réinventer l’Eglise ou les relations
œcuméniques ? comment retrouver un Souffle qui rassemble ? Dans mon
mémoire de master en 2010, j’ai défini 6 piliers pour que l’œcuménisme puisse
avoir de l’avenir. 6 piliers, c’est à la fois peu et beaucoup. C’est en tout
cas retrouver la base de la vie de foi, comme nous le disent les 3 textes
bibliques que nous venons d’entendre.
Le premier point, mis en valeur dans la lettre de Paul aux
Ephésiens, est celui de la réconciliation déjà vécue en Christ mais toujours à
vivre avec nos frères et sœurs aujourd’hui. De
ce qui était divisé, Le Christ a fait une unité. Dans sa chair, il a détruit le
mur de séparation : la haine. Il a aboli la loi et ses commandements avec leurs
observances. Il a voulu ainsi, à partir du Juif et du païen, créer en lui un
seul homme nouveau, en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu tous
les deux en un seul corps, au moyen de la croix : là, il a tué la haine. Le
Christ a tué la haine… Et cette réconciliation voulue par le Christ, c’est un
thème forcément d’actualité dans le monde, mais également dans nos Eglises :
pour être ensemble dans la foi, nous avons besoin d’entreprendre des chemins de
réconciliation. N’oublions pas que des atrocités ont été commises ici dans le
canton de Vaud entre chrétiens, et il n’y pas si longtemps de cela. Si nous
sommes tous de la famille de Dieu, comme le dit l’apôtre Paul, nous avons tous
des blessures à panser.
Donc la première étape d’une revivification des relations ecclésiales, c’est le jeûne (1er pilier). Faire le vide pour faire de la place à l’autre et à Dieu, pour pardonner pour pouvoir prier ensemble (2e pilier) et confesser sa foi ensemble (3e pilier).
Donc la première étape d’une revivification des relations ecclésiales, c’est le jeûne (1er pilier). Faire le vide pour faire de la place à l’autre et à Dieu, pour pardonner pour pouvoir prier ensemble (2e pilier) et confesser sa foi ensemble (3e pilier).
Le ministère du témoignage
Après le ministère de réconciliation, donc, le ministère du témoignage. L’évangéliste Luc nous le
redit avec simplicité : la mission première des chrétiens est d’évangéliser, de répandre la bonne nouvelle que « Le Règne de Dieu est arrivé jusqu’à vous ». Témoigner ENSEMBLE par des actions de solidarité qui touchent les gens. Car dans une société en crise, j'en suis convaincu, l'œcuménisme est la seule voie de salut pour nos Eglises. Si nous, chrétiens de différentes confessions, ne sommes pas capables de nous aimer, de porter l’Evangile ensemble tout au long de l’année, et pas seulement en janvier, si nous ne pouvons pas montrer un engagement commun, alors quelle pertinence peut avoir encore cette « bonne nouvelle » pour le monde ? Il n'y a pas de doute sur ce plan-là: la crise doit nous rapprocher et nous forcer encore plus à travailler ensemble, encore plus à montrer au monde un visage uni !
Et vous l’avez entendu, Jésus envoie ses disciples en
mission deux par deux. Pas seul, mais
enrichi de la foi de chacun. Et si nous nous mettions à évangéliser, à répandre
la Bonne Nouvelle, deux par deux ? un catholique avec un réformé ? un
réformé avec un évangélique ? Un évangélique avec un catholique ?
Ancré dans la Parole, comme le CBOV
Oui nous devons marcher ensemble comme dans un pèlerinage (4e
pilier) pour témoigner au monde dans des œuvres, symboliquement comme l’aumône
(5e pilier). Le 6e pilier, c’est la Bible et elle est essentielle,
comme nous le démontre l’exemple des premiers chrétiens dans les Actes des
Apôtres : si notre travail n’est pas ancré dans la Parole, la Bible comme
révélation de la Parole de Dieu pour nous, alors tout est vain. La Parole doit
être mise au centre, enseignée, priée, méditée, lectio divinée, et surtout…
partagée ! Sans partages bibliques, nous perdons un grand acquis de la
réforme qui est celui de la liberté d’expression dont on a tellement parlé
ces jours! Sans partage biblique, nous perdons les richesses de chacun, nos
couleurs du cocktail, et tombons rapidement dans le fondamentalisme.
Alors, l’œcuménisme va-t-il à vau-l’eau ? Un petit
village d’irréductibles résiste encore et toujours. Sur la colline de
Vaumarcus, depuis 70 ans, et de manière œcuménique depuis 44 ans, des chrétiens
de différentes confessions de 4 à 94 ans se réunissent pour partager autour de
textes bibliques. Le Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus (CBOV pour les
intimes) est un exemple de succès œcuménique : ancré dans le partage de la
Parole, dans le vécu commun, dans la communion et la communauté, les
participants à ce camp s’aiment et témoignent au monde de leur amour et de leur
engagement.
Au peuple de Dieu de prendre ses responsabilités
Alors en définitive, où est Charlie ? où allons-nous
dans une société et une Eglise en crise ? Eh bien pour sortir de la crise,
je crois fermement que l’Eglise et l’œcuménisme doivent remettre au centre
leurs ministères de réconciliation et de témoignage, ancré dans la Parole et le
partage, comme l'illustre la réussite du Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus.
Mais surtout, l’Eglise doit être portée par le peuple de Dieu, et le peuple de
Dieu c’est vous, c’est nous ! Ce n’est pas à l’institution de changer, c’est au
peuple de Dieu de prendre les choses en main ! Alors je vous pose ce matin
la question : êtes-vous prêt pour témoigner et faire changer les
choses ?
Où est Charlie ? Vous l’aurez compris, c’est à chacun
de prendre ses responsabilités, de résister pour réinventer le monde de demain.
Pour écrire la page encore blanche de l’histoire de l’Eglise du XXIe siècle Car l’unité de l’Eglise, c’est l’affaire
de tous. Que Dieu nous accompagne donc et nous aide à être ensemble des témoins
dans le monde, témoins de cet amour infini de Dieu pour son peuple ! Et
ainsi, peut-être, nous pourrons retrouver… Charlie !
Amen.
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