L’Eglise de demain sera communautaire et spirituelle ou ne sera pas

On le lit partout : les églises se vident, l’Eglise se meurt. Et si, comme on proclame lors d’un avènement d’un nouveau monarque, nous osions dire : L’Eglise (d’hier) est morte. Vive l’Eglise (de demain)!

Jeune pasteur avec deux ministères, d’une part dans la paroisse de Savigny-Forel dans la périphérie de Lausanne, et d’autre part dans la région Lavaux avec un ministère pour la jeunesse, j’observe au quotidien l’effritement ecclésial que nous décrivent les statistiques (présence dans les différents événements paroissiaux en baisse ou inscriptions au catéchisme en chute libre). Mais je remarque aussi un ancrage encore relativement important, en particulier dans certains milieux ruraux, ancrage dont nous pouvons encore profiter pour oser une parole forte dans les événements sociaux, notamment dans les villages.

Loin de désespérer, je suis donc partisan du verre à moitié plein : je suis convaincu que ce changement ecclésial, ce virage[1], sera positif. Certes, il y a un deuil à faire, celui de « l’Eglise de Grand-papa », florissante dans l’imaginaire des gens[2]. Force est de constater qu’elle n’est plus, simplement, qu’elle ne fait plus partie de notre réalité du XXIe siècle. Du coup, on peut légitimement se poser la question : l’Eglise va-t-elle disparaître ? Je ne le crois pas. Ou plutôt je suis sûr que non. L’Eglise existait hier, elle existera demain, sous une forme assurément, avec d’autres habitudes, d’autres structures, peut-être même d’autres ritualités, mais il y aura toujours des hommes et des femmes chercheurs de sens qui prendront le chemin de la suivance de Christ.

De mon point de vue du terrain, paroissial (avec toutes les générations) et régional (avec les jeunes), je ressens comme un double mouvement de cette évolution. D’une part, s’il y a un certain effritement de la pratique ecclésiale, il y a en revanche une grande demande de ritualité qui demeure très ancrée dans notre terroir. Le baptême, même s’il ne signifie pas toujours un engagement ecclésial régulier pour les familles, reste important pour beaucoup de distancés, tout comme le rite de la confirmation qui vient conclure le parcours de catéchisme. Je suis convaincu d’une chose : à l’avenir, l’Eglise offrira toujours ces rites, même s’ils peuvent évoluer, prendre d’autres formes, voire trouver de nouveaux rites pour mieux accompgner les rythmes de vie qui évoluent. Mais il y aura une demande pour de la ritualité. Car le rite est en fait un repère qui aide à trouver du sens. En cela, l’Eglise restera pourvoyeuse de sens, dont l’humain aura toujours besoin à l’avenir, qui plus est dans un monde post-post-moderne ultracomplexe et mouvant (donc inquiétant, déboussolant). A mon sens, un point fort de l’Eglise, à l’avenir, sera donc la ritualité, comme un prolongement de ce qui s’est fait jusqu’à aujourd’hui, et avec une certaine place pour de nouveaux rites, pour reste en phase avec les rythmes de vie du siècle présent.

Par ailleurs, je ressens aussi l’envie, chez de nombreux collègues, de dépoussiérer l’image de l’Eglise. Et il me semble qu’une tendance qui est en train d’émerger du terrain est l’envie de rendre l’Eglise toujours plus communautaire et joyeuse. L’Eglise de demain, pour reprendre une phrase bien connue, sera communautaire ou ne sera pas.L’Eglise, étymologiquement, est d’abord un rassemblement de personnes, et non pas juste un individu qui prie dans son coin. Trop longtemps, l’Eglise a véhiculé une image triste, austère, voire moralisatrice. De plus en plus, elle cherche à devenir un lieu chaleureux où l’on a du plaisir à se rassembler, à rire, à vivre, à former une communauté au même titre que l’apôtre Paul le décrit dans sa première lettre aux Corinthiens.[3]  Pourquoi les camps marchent-ils aussi bien chez les jeunes ? Bien qu’ils aient 1000 occupations, loisirs ou activités, bien qu’ils soient toujours connectés à leurs nombreux réseaux sociaux, les jeunes aiment cette vie en communauté, joyeuse et libérée, posée et priante aussi, mais avant tout conviviale et accueillante. Nous avons besoin de liens, besoin des autres, pour cheminer avec Dieu.

Alors la communauté de demain, cela pourrait être des Eglises de maison, petite et accueillantes, qui se rassemblent simplement chez les et les autres, ou encore des Eglises plus typées théologiquement ou spirituellement qui investissent d’anciens bâtiments ou des lieux a priori incongrus. Mais le lien est ce qui va primer. Lien entre les croyants, avec la communauté, lien avec Jésus le Christ, avec la spiritualité. Car l’Eglise de demain, en plus d’être communautaire, sera spirituelle ou ne sera pas. Comment être Eglise si l’on ne prie pas ? Comment cheminer avec Dieu si l’on n’a pas l’impression de grandir, dans la sa foi et dans sa vie (concrète et spirituelle) ?

Avec tout cela, qu’imaginer pour l’avenir ? Mon espoir, c’est que l’Eglise puisse strcturellement se simplifier, tout en restant proche des gens. Et surtout, tout en gardant une grande part de créativitié qui a fait sa force tout au long de l’histoire. Garder la proximité avec la population, tout en osant des formes nouvelles d’Eglise ou d’initiative folle : culte à la déchetterie, dans une ferme ou sur les pistes de ski, Spinéma à l’église projeté sur le bâtiment ou repas de Noël solidaire avec les migrants, présence sur les réseaux sociaux par des « capsules » ou série humoristique, etc. Beaucoup de perles qui se font déjà à gauche et à droite. Mais toute ont un point commun : oser. Oser aller à la rencontre des distancés, oser changer les (ses) habitudes, oser s’ouvrir à l’inattendu de Dieu. Pour cela, il me semble essentiel que les ministres conservent du temps pour des projets créatifs, en étant déchargé de certaines tâches, voire que des postes de « guetteurs » comme c’est le cas ailleurs puissent voir le jour. Ces guetteurs seraient des ministres qui, à temps plein, travailleraient aux « fresh expressions » de l’Eglise de demain, à imaginer des projets ici ou là, en lien avec les ministres locaux, pour dynamiser la vie communautaire. Peut-être que l’avenir de l’Eglise passe par là si nous voulons pouvoir construire des ponts avec les distancés d’aujourd’hui qui ne le seront qu’encore plus demain.

Rêver, imaginer, construire ensemble l’Eglise de demain, quoi de plus passionnant ? Le grand défi est de le faire ensemble, avec les 18% de pratiquants, mais aussi avec les 40% de distancés.  Le faire ensemble, en étandant le concernement au maximum. Le faire ensemble, dans cet équilibre équilibre fragile entre dipsonibilité au changement, souplesse, et conservation des activités dites « traditionnelles ».  

Et si l’on rêvait ensemble de l’Eglise de demain ? Moi je rêve d’une Eglise commauntaire et spirituelle, un Eglise de lien où l’on se sent bien et où l’on peut, ensemble, porter du fruit[4]. Et vous, de quelle Eglise rêvez-vous ?










[1] « L’Eglise est au milieu du virage », répète inlassablement  le président du Conseil Synodal de mon Eglise : je peux qu’abonder dans ce sens, tant il me semble qu’il y a à la fois un deuil à faire, celui de « l’Eglise au milieu du village », et à la fois un virage passionnant à prendre, malgré quelques dangers qu’il comporte, pour découvrir un avenir forcément différent mais pas forcément moins bien.
[2] L’était-elle vraiment, florissante ? C’est un autre débat…
[3] 1 Corinthiens 12.
[4] Jean 12, 12-17: Voici mon commandement : aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Nul n’a d’amour plus grand que celui qui se dessaisit de sa vie pour ceux qu’il aime. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur reste dans l’ignorance de ce que fait son maître ; je vous appelle amis, parce que tout ce que j’ai entendu auprès de mon Père, je vous l’ai fait connaître. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués pour que vous alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure : si bien que tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous l’accordera. Ce que je vous commande, c’est de vous aimer les uns les autres.

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