Prédication pour les Rameaux 2017 : "Vous êtes le levain dans la pâte du monde !"

Prédication pour les Rameaux 2017 : Mt 13,31-33
Matériel : bol, spatule, fourchette, fouet, rouleau, moule ; BC en veste de cuisine (avec toque ?), prépare la pâte…

BENJAMIN (depuis le fond): Bon, alors on y va ! C’est le moment que je préfère : quand on sort la fournée des catéchumènes, tout chauds, tout beaux. D’ailleurs en ce jour des Rameaux, c’est le moment de mettre un pain final à leur catéchisme. Parce que bon, ça fait quand même 5 ans qu’on les cuisine ; les ingrédients vont finir par être périmés ! (un temps)

(sur la table) Alors… alors… ai-je bien tout ce qu’il faut ? La recette ? Ah oui, la voici : « Recette du parfait catéchumène, par Betty Grossi. ». Et les ustensiles ? (lisant) Un bol, une spatule à remuer… Une grosse spatule hein, parce qu’il y en a qui sont durs à remuer (je vise personne hein) Il faut aussi une fourchette pour piquer la pâte – en cas d’endormissement – et j’ai même apporté un fouet. Noooon, quand même pas pour eux, rassurez-vous. Par contre, j’ai le rouleau à pâte, oui, oui, il y a des fois où ça peut servir.

Bon, eh bien je crois que j’ai tout ! Ah, j’en oubliais le moule ! (regardant le moule) Bon, j’ai pris un moule, mais il y en a toujours qui ont de la peine à rentrer dedans… Et là vous vous dites : « C’est pour ça qu’il faut un rouleau à pâte ! » Eh oui ! Bon. Ensuite… du côté des ingrédients ? J’ai la farine, l’eau, du sel, du poivre… Ben oui, parce que l’important, c’est qu’on en fasse de bonnes pâtes, avec tous le même goût, et tous la même forme aussi… C’est ce qu’il faut dans notre société : identiques, croustillants à l’extérieur et mous à l’intérieur !

EMMANUEL: Ah non, ASSEZ ! Ce n’est pas possible d’entendre ça ! Mais qui est-ce qui m’a fichu un boulanger pareil !? Un gâche métier, voilà ce que tu es.

BENJAMIN : Ecoute Emmanuel, cher collègue et néanmoins amis, t’es gentil, mais là j’ai pas le temps : j’ai une fournée de catéchumènes à cuire (et je peux te dire que cette volée, ce sont des durs à cuire) ; je suis déjà assez comme ça dans le pétrin, je n’ai pas besoin d’un enfariné de collègue, qui plus est ancien cuisinier, pour me donner des leçons. Moi je m’y connais en boulangerie pastorale : de un parce que ça se voit à ma brioche, hein, et de deux, parce que c’est bien connu, mon humour va croissant !

EMMANUEL: Ecoute, le problème, c’est que tu te trompes de recette : ce ne sont pas de bons catéchumènes, ou de bons chrétiens qu’il s’agit de fabriquer. C’est du Royaume des cieux qu’il s’agit ! Donc c’est toute la pâte humaine qui doit lever ! Et dis-moi : est-ce que tu as pensé au levain ?

BENJAMIN : Euh, ben oui, quand... levain est tiré, il faut le boire !

EMMANUEL: Mais non, pas celui-là. Le levain qui fait monter la pâte ! tu n’as pas écouté le texte biblique que j’ai lu tout à l’heure? Pourtant il était court ! Mathieu, peux-tu nous relire le dernier verset de l’Evangile selon ton nom stp ?

RELECTURE de l’Evangile de Matthieu 13,33

(un temps) EMMANUEL: Ah ! Tu as entendu ? C’est TOUTE la pâte qui doit lever, mais pour ça il faut le levain… Et le levain, c’est ce qui permet au Royaume des cieux de devenir réalité sur terre ! Sans levain, y a rien qui se passe. Nada. Que dalle. Que pouic.

BENJAMIN : Bon OK, c’est à nous d’être du levain dans la pâte, car j’ai compris, je suis bonne pâte.

EMMANUEL : Oui, car sans nous, Dieu ne peut rien faire sur terre ! Comme disait Bernanos : « Dieu n’a pas d’autres mains que les notres pour agir sur la terre »

BENJAMIN : Oui mais le problème, c’est que bien souvent, on oublie cela, et on attend surtout que Dieu intervienne, pour que vienne son Royaume : « que ton Règne vienne » dit la prière, alors vas-y ! A ce propos, un catéchumène m’a demandé : « Dieu, comment est-ce qu’on voit qu’il agit dans le monde ? »

EMMANUEL: Alors tu lui as raconté l’histoire de l’inondation ?


BENJAMIN : Vous connaissez l’histoire de l’inondation ? (Montant en chaire.) Eh bien c’est l’histoire d’un pasteur qui prépare un message sur la providence, l’aide que Dieu nous promet et sa fidélité tout au long de notre vie. Alors qu’il est assis à sa table en train d’écrire, tout à coup il entend un grand bruit. Des gens l’appellent dans la rue. C’est la rivière qui déborde, et il commence à y avoir une monstre inondation...

EMMANUEL : Ah oui, je connais cette histoire. Les villageois, avec de l’eau jusqu’à la taille, sont venus tout exprès sous les fenêtres du pasteur pour lui dire : « Venez avec nous, fuyez ! »

BENJAMIN : Mais non, laisse-moi raconter, rho ! Alors le pasteur se dit : puisque je crois à l’aide de Dieu, je ne vais quand même pas fuir comme tout le monde. Dieu m’aime, il va venir me sauver. Je ne bouge donc pas d’ici. Et il répond aux gens :

EMMANUEL : « Non merci ; Dieu m’aidera. »

BENJAMIN : Un peu plus tard, c’est un bruit de bateau à moteur qui l’interrompt. Il se penche à la fenêtre et voit que l’eau est montée jusqu’au 1er étage. Les pompiers sont venus sur un canot pour le sauver.

EMMANUEL : « Venez avec nous, fuyez ! »

BENJAMIN : Mais le pasteur pense encore une fois : Dieu m’aime, il va venir me sauver. Alors il répond :

EMMANUEL : « Non merci ; Dieu m’aidera ! »

BENJAMIN : Et il referme la fenêtre, tout fier d’être le seul à faire confiance à Dieu. Mais bientôt l’eau envahit son bureau et il doit monter sur le toit de la cure. Alors arrive un hélicoptère de la REGA. Et les sauveteurs lui crient par haut-parleur :

EMMANUEL : « Venez avec nous, fuyez ! »

BENJAMIN : Et ils lui demande de prendre l’échelle de corde qu’ils lui lancent… Mais le pasteur se cramponne à une cheminée, convaincu que Dieu l’aime, qu’il va venir le sauver. Du coup il répond encore :

EMMANUEL : « Non merci ; Dieu m’aidera ! » 

BENJAMIN : Finalement, le courant emporte tout sur son passage, et le pasteur, évidemment… meurt noyé !

EMMANUEL : Ah c’est gai, ton histoire !

BENJAMIN : Alors le pasteur arrive au ciel, et il enguirlande Dieu… (Descend en courant de la chaire.) Alors, qu’est-ce que tu fabriques, Dieu ? Je croyais que tu m’aimais. Je te faisais confiance. J’ai cru que tu allais m’aider ! (un temps) De quoi te plains-tu ? dit Dieu. Je t’ai envoyé des villageois, un canot de sauvetage et un hélicoptère… Mais qu’est-ce que tu fiches ici ?

EMMANUEL : … Oui, peut-être qu’on ne sait pas toujours voir, sentir, comprendre quand Dieu fait quelque chose dans notre vie, nous fait un signe.

BENJAMIN : Non ce n’est pas ainsi. En fait, on ne reçoit qu’un tout petit peu de levain pour faire monter la pâte. Ca paraît si dérisoire, mais ça peut tout changer. Dieu est discret et il compte sur nous pour rendre un peu plus beau le petit coin de monde où nous vivons, nos villages, notre canton. Parce que notre région le VAUD bien, hein ?
BENJAMIN : Si tu vois un point blanc sur le lac de Brêt, c’est un signe. Mouarf. Mais oui, tu as raison : on voudrait tellement que ce soit magique : allez hop, tout le Royaume des cieux d’un coup et Dieu qui s’y fait fracassant et qui du coup fracasse le mal. Boum !

EMMANUEL : Mais ce n’est pas ainsi.


EMMANUEL : Ben oui. Les médias adorent montrer tout ce qui va mal, mais de temps en temps, sur un coin de page, ou tout à la fin du téléjournal, on trouve un petit signe de bonté, de gentillesse, de générosité. C’est peut-être ça, le levain de Dieu.

BENJAMIN : Oui, il suffit d’un tout petit peu pour faire lever la pâte humaine. Mais ça ne se voit presque pas.  Mais tout de même, le levain travaille… Et la pâte monte, malgré tout.

EMMANUEL : Le levain travaille, ça veut dire que le mal n’a déjà plus toute la place, et tout le pouvoir. Une main tendue dans une situation difficile, un regard bienveillant et sans jugement au-delà des apparences et des étiquettes…

BENJAMIN : Le levain travaille, et la haine n’aura pas le dessus : des jeunes qui refusent le règne de la peur et du terrorisme. Le levain travaille, et si l’on pose la main sur le monde, on sent l’amour qui le fait bouger. Il ne faut rien qu’un tout petit peu de levain, mais ce levain…

EMMANUEL : C’est peut-être vous les jeunes !!! C’est peut-être AUSSI vous les moins jeunes : parents, grand-parents, paroissiens.

Oui chers jeunes, et chers moins jeunes, c’est à VOUS maintenant d’être levain dans la pâte, de réaliser le Royaume de Dieu sur terre, enfin ce que cela veut dire pour vous. A vous d’agir, avec cette confiance en vous que Dieu vous aime et qu’il chemine à vos côtés, quoi qu’il arrive. A vous d’oser demander sans cesse à Dieu son Saint Esprit, oser la vie avec Dieu, même si pour cela il faut persévérer. A vous de faire en sorte que ce monde soit beau, plein de respect, d’accueil de l’autre tel qu’il est. Comme un Père Abrams, et ses 4 fils. Comme un Bless the Lord my soul, où chacun est accueilli tel qu’il est en vérité. Oui c’est ça, à vous de faire un petit Taizé, ici sur terre. Portés par l’Esprit de Dieu en vous, que Dieu vous aide à être levain de la pâte de son Royaume. Un Pain c’est tout.


Amen.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Discours du 1er août: le cervelas, symbole de la Suisse

To be united... or not to be !

"Son of God": un bon film... à l'américaine!